Le Pérou a pour caractéristique d’avoir promu l’espagnol comme langue officielle tant à un niveau macro que microlinguistique. L’État a exercé des pressions très fortes à l’encontre de la préservation des langues premières du Pérou. Les langues premières ont rencontré un climat collectif d’hostilité marqué par l’exclusion et la discrimination à l’époque républicaine. Un tel climat est encore largement perceptible et l’on peut encore parler de discrimination linguistique dans la région andine. Je décris ici le haut taux de diglossie au Pérou que j’assimile à une manifestation de l’Apartheid Linguistique. Après avoir examiné le panorama actuel et la perspective du point de vue de la spécificité culturelle, je passerai en revue les langues du Pérou en relation avec leur nombre et leur situation sur le territoire pour m’attacher aux différentes législations relatives aux langues premières dans la Constitution du Pérou. Une partie de cet article sera également dévolue à la présence et à l’action de deux femmes parlementaires autochtones péruviennes au Parlement qui ont récemment manifesté leur spécificité tant linguistique que culturelle,
Hilaria Supa Huaman et Maria Cleofé Sumire de Conde. Je concluerai sur une note d’optimisme concernant l’interculturalité.
Miryam Yataco est sociolinguiste, activiste sur la question des droits linguistique dont l’expertise en matière d’éducation bilingue et interculturelle est reconnue. Elle poursuit une thèse de doctorat en sciences de l’éducation à l’Université de New York. Elle a collaboré durant cinq ans avec le professeur Joshua Fishman et est membre de la Faculté de la Steinhardt School of Culture Education and Human Development de l’Université de New York (programme des etudes multilingues et multiculturelles). Titulaire de nombreuses bourses et prix tels que le Frances C. Allen Fellow du Newberry Library D’Arcy McNickle Center pour l’histoire amérindienne et de l’American Association of University Women Education Foundation, elle a enseigné à l’Université de Long Island et à la Fordham University. Depuis de nombreuses années, elle collabore à divers postes du Congrès des Peuples Autochtones au Pérou, en tant que consultante et créatrice de programmes éducatifs ainsi qu’en tant que conseillère parlementaire sur les questions des droits linguistiques. En 2009, elle a notamment contribué à mettre sur pied un Diplomado en droits autochtones, éducation bilingue et interculturelle pour le compte d’un groupe parlementaire autochtone au sein du Congrès du Pérou. Son projet en cours de publication porte sur la présence des femmes autochtones au Parlement péruvien de 2006 à 2011. Son champ de recherche englobe la revitalisation des langues autochtones, la planification linguistique pratique et théorique, la politique linguistique, la théorie du développement cognitif et du bilinguisme, les phénomènes de langues en contact, l’acquisition et l’apprentissage des langues secondes et étrangères, les questions d’oralité ainsi que la planification en matière d’éducation.